PWC Nis - Serbie - 03 juillet 2005

Après 22 heures de trajet, nous arrivons enfin dans un patelin paumé au fin fond de la Serbie.
C’est sympa la compèt en parapente. Ca permet de découvrir les uns après les autres tous les trous du cul du monde. Et bien sûr, comme d’hab, il pleut à torrent.
Heureusement, l’acceuil des locaux parvient à nous faire oublier tout ça. Tous les compétiteurs sont logés chez l’habitant (il n’y a bien entendu aucun hôtel).
Pour notre part, nous sommes avec Caro, Hubert, Arnaud et Kortel dans une belle maison, où nos hôtes nous ont carrément installé à leur place. Et évidement, personne ne parle un seul mot d’anglais dans la maisonnée. Ni d’allemand, ni quoique ce soit d’ailleurs, excepté le Serbe. Donc la communication se fait à grand renfort de gestes, sourires et tournées de Rachia, l’alcool fort local. Personne ne sait ce que dit son voisin, mais on s’entend bien.
Lundi.
La météo n’est pas dramatique, nous montons au déco. Mais c’est couvert, est rien ne bouge. La manche est annulée vers 4h. C’est bien évidement à ce moment que le ciel s’ouvre. Mais il était trop tard de toute façon.
Mardi. Enfin, nous avons volé.
Bien qu’il ait plu depuis 4 jours, la masse d’air n’est pas très humide. Le ciel est clair, avec 2/8 de cums. Mais les plafs sont bas, aux alentours de 1500m.
Après une montée éprouvante en camions militaires, nous patientons tranquillement au déco, tout content de voir enfin le soleil. Pendant ce temps, le comité de pilotes nous concocte une petite manche bien sympathique.
88 km, avec un petit aller-retour le long du relief principal, puis 62 km de plaine, vent de cul en direction de la frontière Bulgare.
L’aller-retour est délicat à négocier. Pas difficile, mais délicat. Les conditions sont très changeantes, avec de grosses zones ascendantes et descendantes. Tout est dans l’observation et le placement. Il ne faut pas hésiter à se dérouter franchement pour rejoindre la bonne zone de cheminement. A ce petit jeu, je foire mon start, mais je négocie bien la B1. Ce qui fait que de retour au déco, je suis dans les premiers avec Marco, Charles, Bérod, Drouin-Drouin et tout le premier groupe. Mais malheureusement, nous sommes hors cycle. Une bonne quarantaine de pilote se regroupe donc à la recherche du bon cycle quelque part sur la crête, pour pouvoir plonger derrière sur la plaine.
Quand enfin ça monte, c’est partout en même temps. Donc le second groupe fait le plein au déco, pendant que nous sommes plus loin sur la crête. Il va donc y avoir deux options en plaine, on va rire. Mais en fait, nous sommes dans l’axe d’une belle rue de nuages, et ils finiront par nous rejoindre. Mais dessous. Au moins, ils ne nous passeront pas devant.
Notre groupe avance doucement, comme d’habitude en plaine. Le brésilien Franck Brown fait le moteur en prenant systématiquement la tête du groupe. On voit qu’il est dans son élément. Il est impressionnant de réussite dans ses choix. Derrière, personne ne cherche à faire le mariolle, nous le suivons bien sagement. Les conditions sont d’enfer : thermique tranquille à +2, +3, pas un brin de turbulence, pas de coup de baise, et un beau paysage. Que du bonheur.
- J’vais l’bouffer le gros !
Tout doucement le goal arrive. La pression monte. Maurer se positionne derrière et haut, Hausi commence à attaquer, deux trois voiles mène la danse dessous. Les esprits s’échauffent !
A 15 km du goal, la course est lancée. Hausi part devant en tentant le tout pour le tout à finesse 12. Drouin Drouin le suit. Maurer part derrière, le plus haut de tous et il pousse à fond. Tout un groupe se lance à la poursuite de Hausi, mais trop tard et pas assez haut pour vraiment pouvoir pousser à fond et le rattraper. Je choisis de monter plus haut qu’eux avec Bérod et Kortel, afin de de pouvoir pousser plus fort. Cette option à le mérite d’être plus sûre, mais on sacrifie les chances de victoire.
Cette décision étant prise, ça se passe plutôt pas mal. Nous parvenons en effet à rattraper le groupe des suiveurs et à doubler les plus attardés. Mais Hausi Bollinger, Maurer et Michael Wichi sont irrattrapables et ils gagnent la manche ex-aequo. Stef Drouin fini 5ème, sa prise de risque est bien récompensée.
Nous bouclons avec Denis et Patrick aux environs de la 10-15ème place, deux minutes derrière les premiers.
Cette manche fut un régal. Un vol tranquille, sans risque autre que tactique.
Manche 2 :
Après une journée off de plus, nous retournons au déco. Pour un temps mini cette fois-ci.
Je hais les temps mini. Je n’ai jamais réussi un temps mini.
Et ça ne va pas rater encore aujourd’hui.
Il est clairement identifié que les journées sont courtes ici, et qu’il faut voler tôt. Pourtant, bien qu’ayant décollé dans les premiers, j’attendrai deux heures avant de partir.
A ce jeu de qui partira le dernier, quasiment tous les leaders se font avoirs. Dans la dernière grappe se trouvent Maurer, Franky Brown, Oli Rössel, Bruce Goldsmith, etc... que du beau monde. A un moment, alors que nous savons déjà qu’il est trot tard, tout le monde se met à crier à la base du cum : « Go, go, go ! » dans au moins 6 langues différentes. C’est excellent, et un poil surréaliste.
Malgrès cela, nous attendrons encore au moins 10 min avant d’y aller. Et comme prévu, c’est un tas pour tout le monde. 34 bornes pour moi, 68 pour le premier.
Le soir, la première page des résultats ressemble à une dernière page habituelle : que des inconnus à l’exception de Thomas Brauner.
Le brésilien Tacenco et Charles Cazaux font la bonne opération du jour en partant tôt et en limitant la casse.
Vendredi :
Aujourd’hui, nous revenons à une course au but. Assez similaire au premier jour, pour 94 km.
Sauf que les conditions ont l’air nettement moins fumantes.
Je prends un bon start, et la tête de la course avec Maurer. Nous avançons vite, en prenant la tête l’un après l’autre. Passage de la première balise ensemble, avec la meute qui suit.
Le retour vers le déco face au vent à l’air facile. Maurer décide de passer tout droit, je préfère suivre la crête, plus long, mais plus sûr. Et en effet, je passe mieux. Du coup me voilà tout seul devant. Je surveille la plaine : ça n’a vraiment pas l’air terrible. Du coup, il n’y a aucun intérêt à se détacher du groupe : attaquer seul en plaine relèverait du suicide.
Je ralentis donc, et j’enroule chaque thermique rencontrer. Et étonnamment, moins j’ai l’impression d’aller vite, plus je fais le trou avec mes poursuivants !
En effet, le fait d’être devant est d’assurer mes plafs me place dans une masse d’air favorable et m’évite de niaiser dans les basses couches, là où les ascendances sont mal organisées.
J’arrive à rester haut, alors que derrière, comme ils cherchent à me rattraper, ils assurent moins les plafs, et comme en plus ils accélèrent en transition, ils arrivent plus bas, dans une situation moins favorable.
Résultat, après 25 km de course, je croise le groupe par en haut avec 4-5 km d’avance. C’est sympa, mais complètement inutile. La plaine à vraiment l’air naze, il faudra tout de même que j’attende des petits camarades pour m’y jetter.
La dernière balise au relief tournée, je fais du tourisme. Les plafs sont à 1750m. Je me retrouve à 2150m, devant le nuage, alors que dessous, ça rame sévère !
Allez les gars, on s’active ! C’est pas que je m’ennuie, mais presque.
- Tout seul en tête
Enfin, les premiers arrivent : Maurer, toujours, Caron, Cazaux, Thomas Brauner, Michael Witschi, Olidhal. Que du bon, ça va envoyer !
Comme prévu, c’est l’angoisse : non seulement les thermiques sont faibles, mais en plus, nous récupérons du vent de nord de face au lieu du sud prévu... merci la météo.
Dans ces conditions, pas facile d’être toujours bien placé. Nous luttons tous pour la survie, ça papillone dans tous les sens, dès que quelqu’un monte, on se jette dessus. Parfois dessous. Même souvent. Une erreur de placement, me place dessous, et du coup, c’est moi qui suis contrôlé. Je n’aime pas ça, je m’énerve. Alors que ce n’est vraiment pas le moment, Thomas part devant, Charles, Jean-jean et Michael suivent. Ces deux derniers poseront, Thomas ira le plus loin, Charles survit. Et pendant ce temps Maurer me nargue, 50 m dessus. Et le bougre sait tourner un noyau, impossible de le gratter.
Nous rejoignons Charles, pour aller mourir peu de temps après quelque part dans la brousse.
Mais nous ne seront pas les plus loin. En effet, derrière, voyant que la manche ne bouclerait pas, un groupe décide de prendre une ligne plus favorable, mais éloignée de l’axe. Cette ligne aurait été suicidaire pour arriver au goal, mais aujourd’hui, ramenée sur l’axe, elle leur permet de faire 10 km de plus.
Maurer profite de cette manche pour prendre la tête du classement permanent. Et vu comme il vole, ça ne va pas être facile d’aller l’y déloger...
Manche 4 :
Un petit aller-retour le long de la crête, puis un zigouigoui en plaine, mais vers l’ouest cette fois-ci, puis un goal à Nis, la grande ville du coin.
Au start, c’est l’angoisse. Ca ne monte pas bien fort. Comme d’habitude maintenant, je m’en sors mieux que les autres dans les petits thermiques. Je me retrouve donc à attendre l’heure du start 300m au dessus de tout le monde. Je me cale sur la crête, et je regarde les autres rattasser. Mais 5 min avant l’ouverture, le gros de la troupe (pas que Bérod, hein ?, un peu tout le monde) se mets à monter en avant du relief. Je persiste dans mon option avec mon petit groupe qui commence à me monter dans les pieds.
Mais l’option s’avère mauvaise. Le premier glide lancé, nous nous faisons tous enfoncer à -4m/s, alors que devant les autres passent comme une lettre à la poste.
Et vlan, 2 thermiques plus loin me voilà 60ème avec 2 bons kilomètres de retard. Je hurle un grand coup, et je me reconcentre. Mais vu que les thermiques sont un poil techniques, j’ai de bonnes chances de refaire mon retard. Je passe en mode « sans pitié » dans chaque bulle. C’est-à-dire que je me cale dans le noyau, et tant pis pour ceux qui sont autours. Cette technique de sagouin s’avère payante. Tout doucement, je bouffe ceux qui sont au dessus de moi. Je profite de ceux qui sont devant pour choisir les meilleurs cheminements, et j’accélère dans chaque transition. Nous revenons vers le déco. La plaine est bientôt là, et il faut absolument que je aborde dans le groupe de tête, sous peine de vraiment ramer par la suite. Heureusement, les conditions sont vraimcycliques, et le groupe de tête perd un peu de temps. J’arrive enfin à le recoller par-dessous. Ouf, sauvé. Je sais maintenant que je vais repasser devant. En effet, j’ai un net avantage dans ce genre de thermiques. 5 min après, je suis de nouveau au-dessus de tout le monde. Et j’ai bien l’intention d’y rester. Pour cela, je bannis toute option personnelle. Je ne fais que contrôler la course, en me replaçant au dessus de chaque grappe qui monte un peu fort. Et j’attends que le groupe parte. Hausi prend de nouveau feu et il attaque tout seul devant. C’est joli, plein de panache, mais pas très inquiétant. Il va juste nous permettre d’avancer un peu plus vite. Nous le rattrapons en effet assez vite. Les conditions sont bonnes, il n’y aura plus de surprise. Les instruments indiquent que le but est à finesse, mais tout le monde monte encore : le sprint final se prépare.
Mathias Roten part le premier, pour 7 km à fond. Tout le monde suit.
Les furieux du barreau que sont Mathias et Urban Valic sont intouchables.
Derrière, nous retrouvons Kortel, Drouin Drouin, Maurer et moi.
Etant le plus haut de la troupe, j’avais un avantage certains. Mais pousser aussi fort aussi longtemps dans une masse d’air « vivante » requiert des c....... que je n’ai pas encore. Axe de travail pour la saison prochaine.
Au final, c’est la Brésilien Tacenco très régulier qui gagne. Charles fait second, et fête son premier podium en Coupe du Monde. Félicitations !